Les expirants sont priés de patienter

Mes mains sur le volant, je suis superbement calme. A côté, Nadia continue de perdre son sang. Dans mes rétroviseurs je vois arriver dans une chorégraphie millimetrée 3 flics, 2 par la droite et un par la gauche.
1 homme une femme et un homme et ils ont tous la nervosité d'un Teckel sorti du bain.
L'un d'eux, hideux, se permet d'emblée de généreusement me postillonner dessus mais je me dis que ce ne doit pas être le moment de faire de l'esprit. Et puis Nadia est en train de mourir.
- SAVEZ VOUS POURQUOI L'ON VOUS ARRETE?
Moment d'hésitation. Je ne sais plus. Les sirènes, tout ça. J'ai ptet tué quelqu'un par inadvertance.
Celui qui semble être le Teckel en chef ne sourit pas. Il garde les machoires écrasées l'une contre l'autre et c'est comme s'il bandait dans son uniforme, en train de vociférer à pleins poumons. Par de curieuses associations d'idées je lui trouve à présent des ressemblances croisées, le sourcil pervers de Nicolas son autorité la plus supérieure, et la dentition carrée, lapine, rabotée, de l'informe magma Royal. Je me laisse aller à ce cauchemar de cohabitation qui me pend au nez et je sursaute.
- ALORS!
- Ecoutez, je crois que c'est parce que j'avais un téléphone à la main. Mais si c'est le cas, Monsieur l'agent, j'ai une explication à vous donner, elle est là à ma droite, elle est blanche et en train de mourir.
- On verra ça tout à l'heure. Vous allez me donner vos papiers et les papiers du véhicule maintenant.
Merde. Même au mot mourir, il n'a pas regardé une demi-seconde à ma droite, il s'en fout. Je suis mal barré et j'ai plus qu'à lui tendre les papiers demandés. Je suis subitement très las. Les flingues qui pendouillent comme dans une mauvaise série télé américaine, les menottes ostensibles, brillantes, les têtes d'attardés mentaux, les corps prêts à l'abordage ne me font plus rire. C'est donc vrai tout ça, c'est pas du foin. En 2006, la sécurité est un enjeu national, impérieux. Et vital, j'allais dire.

Ill: dave curd.